Tout le monde se bousculait. La rue était pleine, de monde, d'odeur, la chaleur se faisait forte. Une odeur de pain surplombait le tout, et quelques parts dans la foule, un petit garçon criait. Personne n'y faisait attention, cela faisait parti de ce si doux tableau de sois-disant bonheur. Votre curiosité vous pousse à vous demandez pourquoi l'enfant criait ? Une simple réponse pourrez vous suffire. La présence -mauvaise, bien évidemment- d'une certaine personne à ses côtés. Une créatures, malveillante, si on pouvait appeler cela une créature ? Je ne vous conseille pas d'appeler Eleanor, car oui, c'est bien elle, ainsi. Très mauvaise idée. La stryge aux couleurs sombres aurait très bien pu tuer le petit, mais là n'était pas son intention. La femme aux allures d'enfer s'emparait simplement de la bourse du jeune, bourse qui se perdit aussitôt dans une des poches de Eleanor. Un sourire cruel purement satisfait illuminait ses lippes tant dis qu'elle se laissa porter par le mouvement de la foule jusqu'à la sortie de Endorial, sans un regard vers la sois-disant victime. Une fois hors-de-porté, elle ouvrit le petit sac. Son sourire se figea, tant dis qu'elle le vidait. Pas d'argent, simplement des choses d'enfants. Quelques friandises. Un mouchoir. De rage et d'exaspération, l'ange noir jeta violemment la bourse dans l'herbe face à elle. Une chose l'attira cependant. Là où elle avait atterri depuis la bourse, une petite bague, pourvu d'un diamant bleu minuscule. Eleanor la ramassa, l'observant de son œil rouge expert. Elle n'en doutait pas qu'elle en retirerait une petite somme, et son sourire joyeux retrouvé, elle la rangea dans une autre poche.

Le soleil avait un peu baissé. Eleanor était rentré dans la ville, s'était posé sur un mur en brique abimée et n'avait plus bougé. Son masque ténébreux semblait lui brulait là où il touchait sa peau, signe de son humeur agacé. Pourquoi, me direz-vous, alors qu'elle se trouvait bien contente plutôt ? Mais parce que la belle stryge était impatiente, et que son caractère lunatique ne l'aidait pas. Attendre, cela n'était pas son truc. Ses ailes de jais battaient doucement dans son dos. Dans une joie purement intérieur, Eleanor aperçut ce qu'elle attendait. Un vieil homme à l'allure malsain arrivait, un malheureux sac de cuir pendouillant à son épaule. La jeune femme était déjà près de lui, tendant la petite bague.

- Combien ? Dit-elle rudement.

Après une rapide analyse, bien trop longue à son gout, l'homme qui s'avérait être un marchand lui rendit le bijou.

- Pas beaucoup. Ce que vous me présentez-là est fêlé à divers endroit. Et malgré le bonne état de la pierre, ça ne vaut vraiment pas grand chose.

Eleanor ne tiqua pas, reprenant d'un geste brusque ce qu'elle avait volé. Si il ne valait rien, elle préférait le garder pour elle. La tête haute mais le regard ailleurs, elle traversa d'un pas sec l'allée qui la séparait de la sortie. La nuit commençait. L'heure du crime, dirait diverses personnes. Mais pas pour elle, pas cette nuit. Pourquoi ? Parce que dans un léger choc sourd, elle heurta une personne en plein fouet. Imaginez : Eleanor, ayant eu une journée parfaitement inutile, d'ordinaire déjà désagréable, qui hait toucher une quelconque personne qui heurte, cerise sur le gâteau, une stryge blanche. Un frémissement écœuré la parcourut. Ses yeux brulants observèrent celle qui devint aussitôt son ennemie. Tout en elle sentait la gentillesse. La tendresse. Le manque naturel d'animosité. Et surtout, elle sentait à plein nez l'indulgence. Eleanor leva la tête, fronçant son seul sourcil pouvant être vu.

- Aille. Tient, mais je sais qui tu es ! Tu es bien comme je pensais.

Un rire cristallin s’échappa de ses lèvres rouges, son regard hautain et moqueur.

- Tu es la folle. La stryge blanche fiançait avec le centaure ! Brr, effrayant.

- Aille. Tient, mais je sais qui tu es ! Tu es bien comme je pensais. Tu es la folle. La stryge blanche fiancée avec le centaure ! Brr, effrayant.

*Maudits soient les prétentieux stryges noirs!* pensa Ninalys Galathil. Elle venait, pour son plus grand malheur, de percuter l'une d'entre eux. Elle lut dans ses pensées qu'elle s'appelait Eleanor Malina. Ne pouvant rester indifférente aux propos de celle-ci, la jeune femme répliqua sèchement :

-Je m'appelle Ninalys Galathil, chère Eleanor Malina.

Un sourire se dessina sur les lèvres de Ninalys. Mais il disparut presque aussitôt lorsqu'elle se rendit compte de la bétise qu'elle venait de commettre. Elle avait laissé entendre qu'elle était télépathe à son interlocutrice. C'était une erreur qui pourrait bien lui coûter cher...

- Je m'appelle Ninalys Galathil, chère Eleanor Malina.

Le regard de Eleanor fut un instant surpris que la femme, qu'elle ne connaissait pas naturellement, sache son nom, mais une expression d'avidité la remplaça bien vite. Son esprit de déduction l'amenait à penser que la stryge blanche pouvait, d'une quelconque manière, deviner son identité. Un pouvoir télépathique ? Surement une chose comme cela. Eleanor parti dans un nouveau éclat de rire. Son irritation avait laissé place à un pur sentiment d'amusement, elle sentait son humeur enfantine revenir. Elle applaudit légèrement tout en secouant son visage, comme une enfant surexcité, sa tresse noire rebondissant allègrement sur son épaule.

- Oh, c'est amusant, tellement amusant ! Tu es une fine lectrice, Ninalys.

Eleanor arrêta brusquement ses airs de fillettes survoltées, reprenant ses traits cruel habituels, avant de continuer de l'interroger.

- Mais où allais-tu donc ainsi ? Retrouvais ton cher et tendre ?

La jeune femme sourit d'un air hypocrite, sachant presque pertinemment qu'elle ne répondrais pas à sa question. De toute manière, les réponses qu'elle pouvait lui offrir ne lui plairait pas. Pour attirer son attention, il aurait fallu que la dénommée Ninalys est quelques plans secrets, ou qu'elle aille rejoindre un mystérieux amant. Mais cela n'était pas le cas. Il suffisait d’observer un instant la femme pour se douter qu'elle n'avait pas une seule fois dérivé un tant sois peu de son chemin. Mais il lui fallait tenter. Au cas ou.

- Ou bien même quelqu'un d'autre ?

- Ou bien même quelqu'un d'autre ?

La fourberie d'Eleanor Malina n'avait pas d'égal sur tout le continent, en tout cas, pas à la connaissance de la stryge blanche. Ninalys Galathil décida de ne pas répondre à la question et poursuivit sa route. Après quelques mètres, elle s'arrêta et se tourna vers son opposée de par sa nature. Elle lui dit sur un ton de reproche :

-Comment oses-tu me poser de telles questions jeune insolente! J'ai connu des personnes de ton espèce bien plus respectueuses. Sache, pour ta gouverne, que je voyage dans tout Dùralas avant de fonder ma maison avec Dryusdan, mon époux. J'espère ne jamais plus te croiser, Eleanor Malina.

Sur ce, elle tourna les talons. La jeune femme se rendit compte qu'elle s'était justifiée devant une stryge noire. Pourquoi donc avait-elle éprouvé ce besoin?

-Bien, alors ne perdons pas de temps. Au plus je m'éloignerai rapidement de toi, au mieux je me porterais.

Eleanor eut un minuscule, minuscule sourire. Oui, il n'était pas réellement probable que la stryge blanche croit juste une seule de ses paroles. Pas réellement du tout, si Ninalys avait bel et bien ce.. Ce "don". Et puis, simplement le ton peu amène de la femme lui faisait comprendre. Mais cela n'empêcha pas Eleanor de continuer ainsi un peu son jeu. Peut-être simplement parce que cela l'amusait beaucoup.

- Hey, oh ! OK, je suis pas encore éclopée, mais il y a des limites à ma vitesse de blessé, s'exclama la jeune femme en voyant l'autre partir d'un pas sec et rapide.

Puis elle trottina jusqu'à son ennemie qui en était devenue une par la logique que tout le monde en était un, boitant avec exagération jusqu'à l'atteindre. Celle-ci revint quand même l'aider -quoi que cela soit inutile, enfin-. La stryge noire savait les portes de la ville plus très lointaine, si elle devait réussir à avoir quelque chose de cette Ninalys, s'était maintenant ou jamais.

- Bon, il nous reste un peu de temps avant d'arriver. Pourquoi continuer de nous ignorer ? Parlons ! Oui, ça peut être amusant !

Eleanor fit mine de réfléchir.

- Le ton ne se serait pas adouci ? Non, je plaisante, je m'en fiche. C'est vrai que toi et ton.. Uhm.. Ami, avez l'intention d'avoir un enfant ? Mon dieu, qu'elle horreur.

Puis elle éclata de rire. Avec un peu de chance, la femme s'énerverait.

[Horriblement court et pas terrible du tout. Désolé .__.]

Eleanor continua d'avancer en silence, presque calmement. Bon. Son intention de rendre la balade légèrement distrayante était tombé à l'eau, et maintenant un silence lourd flotté autour des deux femmes. Bon. Au moins, elle arrivèrent assez rapidement à la ville. La stryge blanche laissa tomber la brune au sol qui, dans un moment de surprise, n'eut pas le temps de se rattraper. La jeune femme se releva vivement, et se rappela -trop tardivement- qu'elle était censé avoir mal. Et bien, tant pis se dit-elle. De toute manière, l'autre n'y avait pas cru un seul instant.

-Alors, on fait quoi maintenant?

Eleanor haussa les épaules, réfléchissant rapidement. Plusieurs options s'offrait à elle, et peut-être que partir était la meilleure. Mais une autre idée lui vint à l'esprit.

- Là, dit-elle en pointant un bâtiment de briques marrons, je pense que je vais y aller. Peut-être que tu veux venir ?

La forte odeur d'alcool ne nécessitait pas de préciser ce qu'il y avait là-bas. Un bar, une taverne. Endroit que généralement, Eleanor appréciait. Elle avait "invité" la stryge blanche d'un ton plat, sachant pertinemment son refus. Elle n'était surement pas ce genre de personnes. Quoi que, après tout, elle ne connaissait d'elle que son nom.

- Ce sera avec joie, dit l'autre.

Avant que Eleanor n'eut le temps de répondre, la stryge blanche la dépassa pour pousser la porte de la taverne et y rentrer. La jeune femme rut un bref éclat de rire, devinant aisément que Ninalys n'y allait pas avec joie. Elle la suivit, la jeune femme entrant à son tour dans l'établissement malfamé. Ce n'était pas réellement son endroit de prédilection, elle avait quand même quelques gouts de luxes qu'elle aimait assouvir. Mais bon, elle ne se sentait pas gêné comme semblait l'être l'autre femme d'être ici. Celle-ci avait déjà demandé un verre, au comptoir, et Eleanor la rejoingnit. Elle tira une chaise et s'assit nonchalamment dessus tout en réclament un verre. Puis elle se tourna vers Ninalys.

- Il ne faut pas être gêné. Bien entendu, il y a une odeur déplorable. Enfin, rien est parfait.

La jeune femme but d'un trait le contenu de son verre avant de continuer.

- Tu ne viens pas souvent dans des endroits comme ça, n'est-ce pas ?

Et elle devança sa compagne de son pas rapide et élégant, la laissant seule dans la rue. A peine eut elle poussé la porte qu'une forte odeur d'alcool et une puanteur dont elle ne parvenait pas à déterminer l'origine lui firent tourner la tête. Derrière elle, le battant de bois s'ouvrit de nouveau pour laisser entrer Eleanor Malina. Ninalys, pour ne pas montrer sa gêne, se dirigea vers le comptoir et demanda un verre...

[UP]